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Sunyata Zendo
22 janvier 2010

Silence


monastery

Tout comme la vie même, la paix est chose instable, elle doit croître et décroître, s'adapter, supporter des épreuves et bien des métamorphoses. Il en était ainsi de la paix de cet  ermite japonais, elle était fragile, tantôt visible et tantôt cachée, tantôt proche comme une lanterne tenue en main, tantôt lointaine comme une étoile dans le ciel d'orient.

Le temps aidant ce fut pour ce solitaire un genre de tourment, qui vint de plus en plus souvent lui rendre ses méditations, difficiles. Ce n'était pas une émotion violente, puissante et passionnée, ni une révolte, une exaltation de ses instincts, mais plutôt un sentiment qui s'il était dans les premiers temps aisé à supporter, qu'il percevait à peine, une torpeur de l'âme, un effacement du moi devenait à présent terrible aiguillon qui transperçait ses jours et ses nuits.

Il y a des jours sans rayons de soleil, ni averses, mais où le ciel s'enferme silencieusement sur lui-même, où il est gris sans être noir, où il fait lourd, sans que cela atteigne la tension de l'orage ; Les jours de ce moine devinrent peu à peu ainsi, de moins en moins ses jours ne se distinguèrent de ses nuits, ses envols de ses abattements. Tout s'écroulait paresseusement dans l'inertie de la lassiture et de l'ennui. Il était triste, car il s'était promis de son isolement et de sa pratique de la méditation plus de clarté et un allègement de la vie, un pas vers la grande harmonie à laquelle il aspirait de toute son âme, le calme spirituel de la maturité.

Sa science de l'esprit semblait le décevoir et le duper, en n'apportant que la lassitude et la grisaille de ce vide sans amour, que ce sentiment de satiété incurable. Il se sentait rassasié de tout, de l'existence pure et simple, de son souffle, et surtout de ces gens qui venaient le voir, pleins de suffisance et emplis d'eux-mêmes, ils éprouvaient le besoin de lui conter leur vie, leurs problèmes et leurs angoisses.

moineIl lui semblait parfois qu'il y avait quelque analogie entre la petite source de sa montagne sauvage dont une vasque de pierre reccueillait l'eau pour sécouler ensuite en filet d'eau sur le sol rocheux puis disparaître et tarir sur ce sol sec et aride. Toutes ces confessions, ces crises de conscience, ces difficultés à être, à donner et à partager, ces égoïsmes petits ou grands, sérieux ou orgueilleux qui confluaient à son oreille, par dizaines, inlassablement.

Mais son oreille n'était pas morte comme ce sol, elle vivait et elle ne pouvait pas éternellement boire, ingurgiter et absorber, elle se sentait lasse, épuisée par cet abus, par ce trop-plein, elle aspirait à entendre cesser un jour ce flot de paroles, d'exposés médiocres sur la seule chose qu'intéressait vraiment ses visiteurs ; eux-mêmes !

Elle aspirait au silence.

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